L’ouvrage Arménie, le voyage fantasmé s’inscrit à la croisee du carnet de voyage, du livre d’art et du récit intime. Porté par une artiste passionnée, ce projet retrace en peintures et en dessins une exploration entre présent et passé, guidée par le besoin de réunir souvenirs familiaux et impressions contemporaines.
C’est en Arménie, lors d’une exposition de ses illustrations pour le recueil de poèmes Mon Ami Toumanian (Sigest éditions), que l’idée du livre prend forme. Ce premier séjour dans le pays ancestral se devait d’être capturé dans toute son intensité. L’artiste emporte alors avec elle un carnet de croquis et une boîte d’aquarelles, outils précieux pour immortaliser monastères, musées, scènes de rue et intérieurs de cafés. Chaque dessin devient une trace de ce rêve devenu réalité.
De retour en France, le voyage se prolonge dans une introspection familiale. L’artiste remonte aux origines de ses grands-parents paternels, nés à Césarée de Cappadoce, en Arménie occidentale. Faute de témoignages directs, elle s’appuie sur des fragments de récits, quelques photographies et, surtout, une recherche iconographique minutieuse. La peinture orientaliste et la photographie de studio de l’Empire ottoman deviennent une source d’inspiration pour recomposer un monde disparu.

Entre rêve et réalité : un hommage aux disparus
Dans cette quête artistique et mémorielle, chaque image prend une dimension symbolique. Les scènes représentées, souvent teintées d’une esthétique nostalgique, ne sont pas de simples reconstitutions : elles incarnent la tentative de retrouver une communauté effacée par l’histoire. Les dessins et peintures déclinent un vocabulaire pictural où le moindre objet, un costume, un motif de tapis, devient un élément de transmission.
L’ouvrage se structure en trois parties : la première est consacrée aux croquis réalisés sur place, offrant un regard contemporain sur l’Arménie actuelle. La seconde, plus historique, cherche à restituer la vie des Arméniens de l’Empire ottoman à travers des reconstitutions inspirées des arts visuels de l’époque. Enfin, la troisième partie revient au présent, mettant en lumière des objets familiaux, des tapis, des photographies anciennes conservées comme des reliques.

Un ouvrage entre exploration intime et engagement
Avec ses 300 pages et autant de peintures et dessins, Arménie, le voyage fantasmé dépasse la simple démarche artistique pour se muer en un acte de transmission. Chaque image, accompagnée de textes manuscrits ou typographiés, crée une proximité intime avec le lecteur. Le livre se veut aussi une invitation au voyage : en aquarellant cartes et itinéraires, l’artiste offre aux futurs visiteurs un guide sensible de l’Arménie.
Mais ce récit visuel ne peut éviter la résonance tragique de l’actualité. Le contexte des conflits récents, en particulier la guerre de 2020 au Haut-Karabagh et l’exode forcé de 2023, pèse en filigrane sur le projet. Loin d’être un simple hommage au passé, ce livre se veut aussi un manifeste de mémoire et de résistance face à la disparition programmée d’un peuple sur ses terres ancestrales.

Un regard artistique et historique sur l’Arménie
Formée aux Beaux-Arts de Paris, la peintre et illustratrice conjugue techniques et influences variées. Son apprentissage de la miniature persane auprès du maître Abbas Moayeri se retrouve dans la finesse du trait et la précision des détails. Son parcours lui a valu plusieurs distinctions, notamment le Prix Saint-Exupéry en 2008 et le Prix de Dessin Pierre David-Weill de l’Académie des Beaux-Arts en 2005. Ses collaborations avec de nombreuses maisons d’édition ont affirmé son talent de passeuse d’images et d’histoires.
Avec Arménie, le voyage fantasmé, elle propose une immersion dans un univers où l’art et la mémoire dialoguent, où les paysages et les visages deviennent des ponts entre hier et aujourd’hui. Un ouvrage poignant, porté par une ambition autant artistique que patrimoniale, appelant à ne pas oublier et à toujours regarder vers l’Arménie.

Pour en savoir plus sur l’ouvrage, cliquez ici.
Merci pour ce très bel article Anna!
Merci beaucoup, Laureen ! Ravie que l’article vous ait plu. Et un grand merci à vous aussi pour votre projet, qui est absolument magnifique !